Question orale sur les nanos, au Sénat – Réponse de la secrétaire d’état Chantal JOUANNO (samedi, 19 juin 2010)

Extraits de l’article de VIVAGORA : Jouanno et les nanos, au Sénat

vendredi 18 juin 2010
par Dorothée Benoit-Browaeys
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Ce 17 juin 2010, Chantal Jouanno, secrétaire d’Etat chargée de l’écologie s’exprime avec clarté devant les sénateurs qui l’ont invitée pour une question orale sur les nanotechnologies.

« On se trompe quand on limite le débat aux risques, car le vrai problème est de savoir pourquoi nous voulons ces nanotechnologies ? »

« Les experts doivent éviter d’être en posture de défense cherchant à cacher les risques et il est primordial que l’on approfondisse la question que tout un chacun se pose : quels sont les avantages pour la société ? ».

« La question centrale est celle de la gouvernance. Il faut être innovant pour associer le public et le Parlement afin qu’ils contribuent à l’élaboration des choix ».

Alors que le gouvernement prépare sa réponse au débat national réalisé par la Commission nationale du débat public (CNDP) après le bilan remis le 13 avril dernier, cette séance illustre une prise de conscience de l’urgence des problèmes posés par les nanos.

Au nom du groupe UMP, le sénateur Louis Nègre a insisté pour que la France fasse pression sur la Communauté européenne pour la réalisation d’actions concrètes.

« Je suis étonné de voir que ces nanoproduits ne requièrent aucune autorisation préalable de mise sur le marché », a avoué ce dernier pointant l’état d’esprit incontournable des citoyens :

« La société juge facilement estimable de comprendre, soigner, protéger les ressources rares et l’environnement mais elle est beaucoup moins encline à valoriser la compétitivité, et encore moins le contrôle des populations. Tout dépendra des choix collectifs raisonnés que nous serons capables de mettre en œuvre », conclut le Sénateur des Alpes maritimes.

Alex Turk, sénateur et non moins président de la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) a réitéré son alerte du 23 février, lors de la réunion de clôture des débats de la CNDP).

« Dans moins de dix ans, nous serons plongés dans une société où la liberté d’expression sera aliénée, avec des rapports humains sous surveillance permanente. Avec un environnement électronique qui nous entend, nous voit, nous suit, nous connaît, toute intimité sera éliminée et de manière irréversible. Comme l’on doit protéger notre milieu biologique, il nous faut protéger le patrimoine qui garantit nos libertés ».

Pour relever ces défis, encore faut-il que les gouvernements et les citoyens puisent avoir prise sur des innovations invisibles, pervasives et sans traçabilité ! Ce point souligné par Marie Christine Blandin est l’unique levier politique.

« Nous avons demandé que soit développée une nomenclature lors de la Loi Grenelle 2 mais cela a été balayé », souligne la sénatrice du Nord.

« Tant que l’on joue sur les mots et que le flou est entretenu entre des formes diverses de nanoparticules, agglomérats, nanostructures, il sera impossible de clarifier ce dont on parle », insiste-t-elle. Ce point semble en effet central pour s’entendre pour analyser les performances et les effets des nanoproduits.

Cet événement au Sénat survient alors que le Conseil national de la consommation (CNC) vient de publier son « Avis sur l’information des consommateurs sur la présence de nanomatériaux dans les produits de consommation ». Fruit d’une intense activité d’un groupe ad hoc tripartite (associant industriels, pouvoirs publics et représentants des consommateurs) amorcée en septembre 2008 à la demande de Luc Châtel, cet avis recommande que « la présence d’un ou plusieurs nanomatériaux dans un produit de consommation doit être portée à la connaissance du consommateur ». Il prône la mention de la forme « nano » à côté de l’ingrédient concerné sur les étiquetages, à l’instar du Règlement Cosmétiques (CE) n°1223/2009. Le CNC estime aussi « indispensable que les pouvoirs publics disposent de données fiables ».

Au plan européen, un groupe de travail chargé de mettre en œuvre une adaptation du règlement Reachaux nanomatériaux (RIP-oN1) plaide pour des cadres réglementaires spécifiques.

S.F. Hansen, représentant du Bureau européen des consommateurs (BEUC) dans ce groupe RIP-oN1 vient de publier un article qui préconise la création d’agences dédiées aux nanomatériaux pour évaluer les informations produites par l’industrie.

De même, S.F. Hansen considère, suivant l’avis du Parlement européen , qu’il faut mettre en place « un nouveau cadre réglementaire basé sur la protection de la santé et de l’environnement, la promotion de l’innovation verte avec un haut niveau de transparence et de participation des parties prenantes ».

La charge de la preuve assurant l’innocuité des produits devrait aussi, selon le représentant du BEUC, être assumée par l’industrie afin d’assurer à temps, la génération de données pertinentes.

Tous ces signaux convergent vers une évidence : les processus d’innovation doivent intégrer précocement les questions sur l’utilité, les finalités et les impacts sanitaires, écologiques et éthiques des inventions et produits.

Dans ce sens, VivAgora a publié le 22 février dernier un communiqué demandant l’ouverture de cinq chantiers.

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